Tornade sous la lune

Aucune expression, aucun sourire,
aucun pli ne vient ébranler ce visage là.

Même quand il parle, sa bouche ne s'ouvre pas.
Les mots arrivent serrés et cloîtrés à nos oreilles.

Parfois, un souffle, l'air gonfle un soupçon de cette joue là.
Est ce que ça veut dire qu'il réfléchit, qu'il est gêné,
emmerdé, épouvanté, exaspéré?
Juste un souffle, qui fait à peine bouger les formes de ce visage là.

Aucune expression, rien, un visage inerte,
un corps encombrant, long, lent et fin.
Un corps radin, qui ne prend pas de place, pas d'ampleur.
Qui se déplace pour ce qu'il faut, juste ce qu'il faut, pas de rab.
Un fil de fer sur lequel est planté une tête de poupée.

Mais,
Peut être Qu'il s'anime quand c'est la lune.
Il attend que le monde aie fermé les yeux.
Peut être qu'à ce moment là, il revit sa journée.
Son visage devient un océan emporté par une tempête.
Il passe du sourire à la fureur, de la surprise aux larmes.
Une tornade de plis se forme, les formes se courbent.
Les yeux s'agrandissent, se plissent, en concert avec la bouche.
Elle, elle s'ouvre, déterre des cris, des rires, des mots, des bruits,
de tout ce qu'un être peut avaler pendant les heures de soleil.
Son coeur d'enfant réveille ce corps là.
Il le fait battre dans tous les sens,
l'envoie sur un sol brûlant qui refuse un pieds trop longtemps.
Les élans se perdent dans une rêverie légère et secouée.

Mais,
quand le monde ne rêve plus,
ce corps là n'est plus celui des merveilles.
C'est le corps qui devint social, c'est le visage qui se fond.
Ceux là répondent à des mots compliqués.
Alors, quand le soleil revient, ils s'enferment, pour en pas être surpris.
Il redevient ce piqué de poupée,
pour ne pas avoir l'air.

Plus aucune expression sur ce visage là.
Il devient un ado parmis les ados, un humain parmi les humains.
Perdu entre deux endroits de lui même,
qui vit ailleurs secrêtement,
en attendant...