La fin ça sent mauvais


On va se faire mangés par des parapluies.
"A Shanghai, c'est la pluie. C'est les chaussures aux semelles comme de la boue. C'est dimanche. Les chinois se répandent partout, s'entassent dans les magasins qui jettent des beats. Des nuées de parapluies aveugles se suivent, se rencontrent, se regroupent. Comme une masse unie et disparate qui va et vient. Ils sont vraiment nombreux c'est chinois.
Notre Hôtel n'a plus d'eau, j'entame mon quatrième jour sans douche. (Et même que du coup je me suis pas lavé les dents!) Cet air moite, venteux, chaud s'accorde bien aux sensations de mon corps. C'est la crasse qui grouille, c'est mon corps qui a appris est devenu fort bavard. Il a appris ça en Chine, ça lui va bien."

"Le vent s'est emparé de ce couloir étriqué. Au bout, une porte qui donne sur des teeshirts victimes, étendus, ballotés. Sur le sol, je voudrais gardé cette image. Des bras tendus, tous chiffonnés, qui se débattent dans un endroit humide d'orange."

"La pluie chinoise se prenait pour une bruxelloise. Le vent criait l'annonce du retour. La lune de Shanghai perchée de quadrillage, perdue dans la brume, nous incitait à savourer cette dernière nuit. On l'a laissée nous emmenés dans cet endroit surréaliste. On nous a accueillie avec des parapluies à la sortie du taxi, après avoir rouler pendant des minutes émerveillées par cette ville, sa nuit, sa pluie, ses routes, ses immeubles, ses lumières. Le hall d'entrée brillait, clinquait, résonnait de notre étonnement. On nous a fait enlevé nos chaussures mouillées, nos chaussettes puantes pour nous offrir des tatanes sèches et aérées. Le sonna, le bain, les massages. Entre filles, à poil. On est toutes pareilles. (Sauf que quand même les chinoises elles ont vachement moins de bourlets.) Puis cette pièce gigantesque, pleine de chinois qui fuient leur lits pour s'affaler, ronfler sur des fauteuils, devant des écrans, sous les mains de masseuses en nuisettes bleues.
Une nuit trop courte. Pas vraiment dormi. Mais dans le minibus qui nous emmène à l'aéroport, pas moyen de rater ça. Un bye bye Shanghai. Pas envie de rentrer. Shanghai qui s'étend loin. Ses immeubles ont la tête dans la brume du matin, du midi, du soir, du tout le temps quand c'est la pluie. Z'avaient qu'à pas être si grands. Je veux rester ici. Les serpents de routes de Shanghai, qui se suspendent, s'entortillent sur trois étages. Les chinois s'amassent dans les bus, dans leur voitures, sur les routes. C'est lundi. C'est un éspèce de matin qui a pas eu vraiment de nuit. C'est la fin, c'est le départ."

Le peintre


Xitang



La montagne a un sacré caractère

"Elles nous ont bien eus ces montagnes. On voulait faire les malins mais... On les a cherchées dés le matin, comme prévu. Pour les rencontrer, il fallait traverser un paysage qu'on avait pas encore vu. Du vert! Foisonnant, riche, équilibré. Les premiers petits bouts de montagnes ressemblent à une chevelure d'africaine tressée, moumoutées, boudinées à certains endroits. La route est toute petite au milieu de tout ça. Et beaucoup trop lisse. Après les choses sérieuses commencent. On quitte les petites exploitations, les petits potagers pour les falaises, les horizons coupés par les versants et la brume. Une couche aux premier abord transparente et mignonne, qui cache une densité trouble, dans laquelle on se perd. On a commencé à monté les marches en pierre dans une odeur de vieille mousse moite et verte. Plus de klaxons. De l'eau qui coule, qui descend lentement un peu partout. Qui se rejoint. Plusieurs qui n'est qu'une seule. Une seule symphonie de tous les côtés. Et les singes. Ces boules de poils caméléons, qui nous observent de loin. Encore un échange de regards intrigués. Puis, ils disparaissent. Les arbres s'entortillent, se posent là, s'installent, émergent de partout. On monte péniblement, sans apercevoir le bout des marches pendant des heures. On croise des porteurs qui montent chargés d'au moins une fois leur poids. Ils ont des mollets comme des ballons de rugby. Dans cette montagne, j'ai la sensation d'avoir plus de poids qu'eux. Je pèse plus lourd, trop lourd d'autres choses qu'eux. Elle, la montagne, elle rit. Doucement d'abord. Elle nous laisse entrer en douceur et en émerveillement.
Puis la pluie. Toute fraîche. Qui réveille les feuilles, elles se joignent au concert. Chaque pierre se met à résonner plus fort, chaque court d'eau monte d'un ton. La lumière se baisse un peu plus. Elle effleure juste les gouttes qui se succèdent sur les branches pour éclater partout. La brume s'épaissit. Bientôt seuls les arbres les plus proches émergent dans un contre jour en contre bas. On observe en se retournant. La montée continue sans nous laisser voir autre chose que nos pieds. L'eau coule, s'imprègne partout, il n'y a pas d'échappatoire. Mon corps crie, brûle. Il pleure même. J'ai la sensation de me laver, de me vider de toute la crasse que les disques amers ont dispersé en moi. Le poids de mes jambes s'enracinent de plus en plus dans la pierre des marches, mais ma tête parvient à s'échapper.
Puis vient le moment où on est enfermés. La brume ne nous laisse plus voir au delà des dix marches qui nous surplombent et n'en finissent pas. L'eau nous englobe, s'impose, s'infiltre, nous assomme. Mon corps ple
ure, ma tête subit. Puis s'inquiète. La montagne rit trop fort. Elle explose de gouttes en rire, sans s'arrêter, folle de fous rires. Elle nous disperse, nous perd...
Puis enfin, elle nous accorde le répit. Le sommet qu'on cherchait, les autres du groupe, les couettes froides qui réchauffent quand même, le radiateur qui ne sèche pas nos fringues imbibées. Mais on est bien. Soulagés, légers. Elle nous récompensera surement demain? En attendant je mets de la musique dans mes oreilles pour pas entendre l'odeur de cette chambre pourrie."


"C'est le matin. C'est le soleil. La montagne nous regarde en face et nous sourit. Un sourire doux et rassurant, mais elle sourit à tous. Dans cet endroit suspendu on voudrait le vide, le rien, le face à face, mais il y a trop, il y a trop de plein. Le chant des oiseaux a remplacé la symphonie humide, mais le bruit des touristes chinois en masse recouvre et écrase. Pas moyen de sortir de ces rails encombrés, ils sont entourés de barbelés."


"Le seul petit coin tranquille est accessible en escaladant un tout petit peu. D'ici, on entend encore les rumeurs. Les yeux peuvent se reposer un peu sur cette mer étrange. Courir sur les roches en sautant au dessus des nuages. Visiter les arbres et s'élancer le plus loin possible, là ou plus aucune distinction n'est permise."


"ça y est. J'y suis. Cet endroit que je cherchais. Le tête à tête avec elle. J'ai quitté les rails en escaladant, pour m'installer sur un sommet caché. L'agitation est beaucoup trop loin pour entrer. Il y a mes genoux et après, c'est le vide. Un panorama gigantesque. La montagne m'a accueillie tendrement, dans ce recoin où je suis si petite. Je m'efface. Elle me montre, elle me guide partout où elle existe, dans tout ce qu'elle est. Le soleil est juste au dessus de ma tête, il m'observe. Ils sont complices. Elle me porte par le dos, les coudes, les talons. Brute. Le vent est son messager, il prend ma tête et l'emmène..."





"Un coucher de soleil sur les montagnes, une nuit trop courte dans cet hôtel tout pourri. Je viens de passer un porte, il est 6h du mat'. La montagne, elle construit son royaume en laissant ses forces libres qui n'oseraient jamais être plus imposante qu'elle. Le pins qui grandissent sur ses roches, ses sommets s'élancent à l'horizontale pour ne pas la dépasser. Le vent a la force de déplacer chaque branche, de faire vibrer chaque feuilles, mais pas ses pierres. Son cri peut résonner, se faire écho à lui même mais pas autant que son silence à elle. D'ailleurs là, on n'entend que lui. Les oiseaux aussi ont lancé leur chant, mais il est vite emporté par le vent qui le ballade dans tous les sens."

"La montagne, elle a un gros nez. On est suspendues au dessus des touristes. La montagne, elle nous regarde d'en haut, à travers les feuillages. Elle a un gros calme.
Les porteurs aux mollets comme des ballons de rugby, montent avec des troncs de bambou sur l'épaule, des lits en bois, pliés , des sacs de riz, des fruits... Et parfois des touristes. Quel étrange troupeau.
En bas, c'est la forêt de bambous. Ils sont gigantesques. Un tuyau rythmé qui monte qui monte tout seul jusqu'à une touffe de feuilles. Ils ont l'air innocent. Le reste de la forêt pourrait ressembler à une occidentale, mais eux, il l'habillent en chinoise. Ils le savent mais simplement."



" Ce matin, on assistait à un coucher de soleil encouragé par les appareils photos d'un cinquantaine de chinois. On s'est lancée dans la descente des marches tout de suite après pour les fuir, les éviter et les engueuler parfois. On se sentait plus aventurière qu'eux. Surement parce qu'au lieu d'une casquette, j'ai un pull enroulé sur la tête, des botes à la place des petites baskets, un jean craqué à la place d'un training (Comme disent les belges. Pou les français c'est un jogging.) Surement parce qu'on est monté sous la pluie et qu'eux ont pris le téléférique. Surement parce qu'au lieu de brailler ou d'écouter de la musique sur nos GSM (encore comme disent les belges. Pour les français c'est un portable.), on écoute les bruits de la montagne. Surement parce qu'au lieu d'être en groupe et de suivre un troupeau et un parlophone (ça aussi c'est belge. Pour les français c'est un mégaphone, ou interphone dans un autre contexte.), on cherche à être seuls et au calme, surement parce qu'on a pas pris de douche depuis trois jours, (et même que moi je me suis même pas lavé les dents!), surement parce qu'on vit le moment au lieu de la photgraphier... Surement pour tout ça. Mais au fond, même si on a escaladé les barbelés pour grimper sur des sommets isolés, nous aussi on a payé l'entrée sur le site protégé, nous aussi on a dormi dans un hôtel, pourri et sans douche certes, et nous aussi on a mangé à son restaurant. En rallant sur les prix exorbitant (presque comparable aux prix en Europe, vous imagnez!), certes, mais quand même. Les touristes chinois sont un troupeau qui suit d'autres troupeaux et nous, nous sommes le troupeau isolé.


Huangshan


"Huangshan est, elle aussi, encombrée par les rues commerçantes, où les beaux objets exposés nous exposent au poids des vendeurs.
Ici, au bord du fleuve, c'est calme. Il n'y a que deux femmes qui lavent leur linge, là, dans cette eau. Un enfant avec elle qui, comme la plupart des enfants chinois, est très calme. Des pécheurs dispersés sur le bord. Le ciel est encombré de brume, mais le soleil perce quand même. Il danse dans le reflet. Au loin, autour, y'a la ville, les immeubles, une petite île. Le tout dans un flou étrange. L'air est chaud, humide. Derrière on attend le petit froid. On le soupçonne mais finalement il n'est pas assez dense. Bizarrement le vent qui vient nous chercher est chaud et doux. Quel étrange ciel celui là. Je le connaissais pas. Il ressmble aux images, aux photos que j'ai vues de la Chine.
Ici, les liens entre certaines choses semblent avoir gardé leur aspect direct. Les gens sont ensemble, les maisons sont étriquées, les femmes lavent leur linge dans l'eau du fleuve, dehors, au milieu des gens qui passent là. Les gens mangent dans la rue, les plats sont communs. Les chiottes sont parfois tellement publiques qu'il n'y a pas de portes, les gosses chient dans la rue en s'accroupissant tout simplement, leur pantalon est fendu à l'entre-jambes. Les odeurs sont fortes et défilent, tout vit. Ce n'est pas lisse, chaque chose a une forme complexe, humaine. Il n'en manque pas un seul côté. Elles sont pleines. A l'inverse, les coins les plus occidentalisés sont vides et froids, agressifs.
Ici, y'a pleins d'oiseaux, de fissures, de briques cassées, de motifs, de trucs entortillés. Tout se mélange, s'accorde. Le reflet est gluant. Je veux pas rentrer. Un papi passe tout doucement, ses chaussures ont l'air trop grandes. Y'a un coq qui chante. Les montagnes se cachent derrière la brume. Espérons que demain elle se montreront. Sinon tant pis pour elles, on ira les chercher quand même. Quel étrange dimanche. Quel ciel étrange. Y'a un tapis de lilas au dessus de ma tête."

Suzhou plus douce







"Une tempête se lève dehors. Le vent se ballade parmi nous. La gare de Suzhou c'est une tempête de gens, d'odeurs, de chaleur, de sacs, de voix fortes en fond de brouhaha. J'ai les genoux, la nuque, les pieds, les bras qui chauffent. Le soleil s'est posé dessus sans que je m'en rende compte. Y'a comme un bourdonnement partout, dans tout. On va à la montagne."

Après un départ raté...


" Le paysage est de plus en plus vert. De plus en plus garni. Il y a plus de reflets, plus de naissances au bout des arbres. 8h de train pour traverser une partie de ce pays sans en parcourir ne serait ce qu'un quart. La Chine c'est gigantesque."

"Nanjing c'est une publicité de propagande du "Chinese dream". Tout le monde a droit à sa part d'éclat. Complètement bariolé et sur illuminé. Du flashi au pétillant en passant par le clinquant, la musique trop forte et rythmée, les arbres illuminés de vert, alors qu'ils sont déjà verts. Une pluie de bourgeons, de magasins tendances. Les jeunes sont tout droit sortis d'un film. Ils défilent dans le métro, sur les trottoirs avec leurs cheveux qui ont la prétention de vouloir touché le ciel. Leurs minijupes qui ne cachent pas la fin de leurs bas, leurs talons bling bling, leurs cliques, tout ici ressemble à une mauvaise pub."

Nihaow!

Voila le début de mes aventures en Chine. Y'a un autre blog avec les travaux des autres du groupe dans la rubrique "des ailleurs", à votre droite.

Une journée infinie



"On a vu le soleil se coucher sur la colline du charbon, dans le vieux Pékin, et on le voit se lever sur les buildings du nouveau . Les arbres dansent, imitant les chinois qui font leurs exercices. Ou bien est ce l'inverse?"

"La grande muraille, son serpent de chemins, ses montagnes. Les morceaux de chair fripée qui vrillent, dessinent et s'étendent. Un panorama rythmé jusqu'au bout de la vue. Orné de chemins, d'arbres. Ceux là d'ailleurs. Les arbres sont des chinois. Ils sont rangés, enracinés dans leur caractère, là où ils doivent être. Ils sont fous. Les chinois c'est des arbres. Ils tiennent, sont unis en eux mêmes par un même tronc par lequel, quoiqu'ils fassent, circule leur souffle. Robuste base, inébranlable, qui les pousse dans des mouvements et des voix maîtrisés, lents, efficaces."

"Une journée interminable. Qui décide de continuer. Du matin jusqu'au temple, puis déambulant par la colline, pour continuer vers des retrouvailles. Une rencontre nouvelle, surréaliste. Dans des endroits sans murs ni toits. Tout ouverts. Qui nous emmène sur les rues bling bling d'un lac, puis dans un jeu d'adresse qui nous échappe, pour finir dans un hotel étrange, orné de lustres, surveillé, où les jeunes , soûlés au thé, au jus de pastèque et aux chansons kitchs dans des décibels faramineuses, passent une nuit acharnée. Cette interminable virée croyait s'échouer sur les reflets des buildings, qui répondent au soleil, mais pour l'instant, elle continue sa dérive, au sommet d'une muraille millénaire.
Mes pieds son en compote. Mais mes pieds sont si petits ici. Y'a le vent qui me fait la bise. Et la muraille qui galope jusqu'au bout de la vue, sur l'arrête des montagnes. Y'a les rizières. C'est orange. C'est brun, gris. La muraille elle est flexible. Elle épouse ses montagnes, se pose dessus avec une harmonie déroutante. Elle a germé avec elle. Elle n'a pas pu naître après. Ce temps qui le sépare ne peut pas exister. Ici, il ne signifie plus rien. Comme s'il n'avait jamais rien voulu dire. Il s'oublie un peu celui là. Il s'endort sur ce constat, elles vivent ensemble et c'est tout. Elles ne sont qu'une seule et même vue, qu'un seul et même étalage de notre petite compote. Mes pieds sont si petits.
Je me sens vivante, pleine, entière. Pleine de moi de nouveau. Un moment entier. Ma chair vibre à chaque passage du souffle du vent, mes yeux crient à chaque seconde mes pieds... Mes pieds sont sûrement en train de m'insulter mais ils me parlent!"

le "798", Centre d'art contemporains chinois














Des rencontres sur la colline


"Une petite dame danse avec son ruban. Je l'observe, elle s'approche de moi en me le tendant. Elle me prend la main pour m'apprendre à le manier. On rit ensemble sans aucun mot."


"Au sommet de Pékin. L'immensité de la cité interdite. La succession, superposition de ses toits, n'est qu'un petit grain minuscule dans ce tas d'immeubles, de maisons, de rues, de lacs, d'arbres, de pierres, de chinois. La ville s'étend à perte de vue, comme si même une fois qu'on ne la voit plus, elle continue jusqu'au bout... Partout autour, elle grappille, habite le paysage.
Mes chanteurs d'en bas sont venus me voir pour mes dessins. Ils me parlent, m'expliquent, mais je comprends rien. Ils argumentent, j'écoute. L'un d'eux écrit sur mon carnet. Je lui réponds, il sourit. Les autres rient, me font des pousses en l'air. Ils sont curieux. Finalement, on écoute ensemble. Moi au milieu d'eux. Ces chinois de l'autre bout du monde et d'une autre génération. On écoute cette chanteuse, la seule femme du moment, qui envoie ses décibels en suivant, en guidant les musiciens. La musique est l'élément qui nous relie chaque fois. Hier Li Xing Hua me jouait du blues pour que je chante, et aujourd'hui, malgré l'incompréhension des visages quand ils essaient de me parler, on écoute. Et là, on est au même endroit. A ce moment là, on s'est rejoints quelque part loin de Pékin, loin de cette colline. Ils sont chaleureux et touchants. Ils m'invitent avec eux, dans leur moments, ils observent mes réactions, avec un plaisir que je devine sur les faussettes qui cernent leurs sourires."


"Un samedi à pékin. Le peuple chinois est dehors. Sous le soleil. Il noircit les rues, les parcs. Le week end, institution universelle fait sortir les gens d'un cycle. La ville est en ebullition. Mes oreilles sont pleines de cette langue qui vient d'une autre partie de la bouche. Plus profonde. Des groupes à casquettes colorées, des enfants qu'on tient par la main, des poses devant les appareils photos, des drapeaux qui guident des groupes, des enfants qui courent, des jeunes qui tiennent la main à des vieux, des poussettes, puis le hutong. Des visages poussiéreux. Plus de touristes. Des vélos rouillés, des gens assis dehors, sur de vieux fauteuilles, des vieilles chaises, des odeurs puissantes qui traversent jusqu'à loin, des fringues étendues partout, un patcworks de maisons en bordel, du ciment, des flaques de boue, des gens accroupis, des cannes soutenant des vieux bossus aux visages marqués, une petite sorcière avec un chapeau zébré, des dents qui manquent, de la poussière..."

On s'est perdues à Pékin




Le temple des Lamas

Y'a des gens




La cité a été interdite.


"Autour de la cité interdite y'a des attrapes touristes, des enfants qui savent à peine marcher mais qui savent mendier en disant "Hallo", des mamans qui leur miment des gestes de pitié, des musiciens aveugles, des chauffeurs de pousse pousse qui nous disent "hallo", "Comment ce va?", y'en a un qui danse avec moi. Y'a des vieux avec des cannes, des parcours sur la grande muraille de Chine "hors circuits touristiques", des groupes avec des drapeaux et des casquettes. Des japonais qui veulent être pris en photos avec des occidentaux, des chinois qui prennent des occidentaux en photos, qui nous regardent, nous dévisagent, Toujours. On est comme des bêtes curieuses qu'ils observent sans complexe, sans tabou, sans distance. Ils s'approchent tout près. Pour nous regarder, ils arrètent tout. Quoiqu'ils fassent, ils arrètent..."

Arrivée à Beijing


"Mes pieds puent, mes cheveux me grattent, mes épaules m'insultent en concert avec mes pieds. Beijing c'est immense. Mais tout calme dans le matin. Tout posé. Même l'air a l'air calme et doux quand le vent passe sur nos joues. Les chinois s'arrêtent dés qu'ils nous voient arrivés. Ils nous observent en souriant et en commentant. L'hôtel est perdu au milieu d'un hutong. Petite ville basse. Un labyrinthes de vieilles petites maisons et de travaux, tout prés de la cité interdite et de la colline du charbon. Y'a le soleil, la poussière, les petites échoppes qui vendent d'étranges beignets garnis, une toute petite supérette avec du vrai thé vert, des vélos partout, suivis d'une remorque, de planches, d'un tas de bois. Y'a aussi des lampions et des signes chinois collés, brillants, sur toutes les portes. Tout à l'heure, y'avait l'horloge de la gare qui chantait. Une musique toute entière, qui plonge quelque part. En regardant autour on est variment ailleurs. Tout est autre. Même ces gens, ils n'ont pas la même forme, les mêmes voix, les mêmes attitudes. Ils ont des nouveaux sourirent. Et même sans tout comprendre, parfois de douces attentions. Entre un drôle de respect et une sacrée fascination, les échanges sont émouvants."