Y'a des moments comme ça

Ils marchent avec moi. Leur bruit résonne dans mes pas. Leur chair se mêle à celle de mes tripes.
Je suis tombée. Y'avait un trou.
Ma chute a vécu le temps d'un cri.
Au fond, silence. Poids.
Mon corps se tordant sur un matelas sculpté, taillé dans mes troubles.
Des crampes ponctuent mes efforts, démantibulent mes membres, lacèrent mes tripes, écorchent ma tête.
Et ils me tombent dessus. Alliés réunis, ils se jettent pour me recouvrir d'une mélasse opaque.
Mon souffle se perd.
Je n'existe plus.
La sensation de mon corps n'est plus.
Je ne suis plus rien.
Mais le temps me rattrape par un bout volé au vif.
Il me ramène.
Je reviens à lui dans ce moment.
Il faut que je retrouve mon souffle. Il me manque.
J'enfouis mes mains, puis mes bras à travers eux pour atteindre l'épaisseur où ils ne sont plus. Il faut tâter son vide pour pousser le reste de mon corps.
En relevant la tête, ils la percent, s'insinuent. Leur matière la plus moi me traverse.
Ils étaient un bout de moi.
Un bout de moi que j'avais laissé exister en dehors. Libres de devenir, de me suivre, perdus.
Ils étaient un bout de moi. Séparé, rejeté, morcelé.
En relevant la tête, ils la remplissent, s'imprègnent dans chacun de mes creux. Je les porte de nouveau tels qu'ils sont devenus.
Mon souffle est revenu.
Il envoie mon corps hors du trou dans un effort tout neuf, asphyxié, dérouté.
La tête enfin au vent et au bruit, je me remet à marcher, bancale.
Ils marchent en moi. Leur bruit est celui de mes pas. Leur chair est celle de mes tripes.

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